Callie Me Deep Inside, part. I
Datant d'Octobre / Novembre 2008 & de Février / Mars 2009.
Callie Me Deep Inside
Partie Une
- Pour qu'on puisse enfin répondre de nos actes! Je bats aussi la mesure, tu sais ? J'ai pensé... J'ai pensé qu'on pourrait s'entendre... entonna Sleepie en rentrant dans la misérable chambre que je partageais avec moi-même.
Ses cheveux blonds acidulés rebondissaient sur ses épaules comme des traînées de poudre blanche sur le marbre de l'évier. Avec une rapidité éffarante, ses deux orbes bleues claires, si claires, clairsemées, sautaient d'un détail à l'autre, évaluaient cet objet, ici, ou cet autre, là-bas. J'aurais été bien incapable de vous la décrire comme le font les grands auteurs, d'ailleurs je n'ai aucune référence à vous fournir, sinon la mienne, excellente par ailleurs.
Ironie quand tu nous tiens. Depuis deux mois, sweetie Sleepie, une fille comme vous en voyez rarement, avait convaincue ma carcasse de se bouger d'hôtel en hôtel. Son petit front se fronçait souvent lorsqu'elle appercevait un reste d'incendie au creux de mes yeux, parfois les siens se rallumaient de cette chaleur de vivre qu'on lui avait insuflée un jour, dans son sommeil. Deux pomettes rebondies témoignaient pour sa douceur, un piercing, peut-être trois, sans doute six, et un tatouage, au creux de mes reins, trois mots ;
anywhere but inside.
Des jambes fuselées et une robe, la robe de scène! Dans un sursaut inconscient, je me relevais, à demi je vous rassure, pour me souvenir, enragée, de la scène, du monde, de l'adrénaline, si forte que j'aurais voulu en crever, en hurler des mots ma belle!
Sleepie, son nom de scène bien sûr. Ou alors avais-je à ce point perdu l'esprit qu'à ma convenance, dans un joyeux bouillon je mélangeais iréel à réalité ? Ma réalité, auraient clamé Téléphone.
Ouais, littérature, j'suis nulle, mais bonne parolière, ça mon dieu je le jure ! Que la cour solenelle me condamne si jamais un de mes mots n'est pas le mien!
Ensuite, Sleepie, lorsqu'elle m'eût longtemps dévisagée, entreprit de froncer ses fins sourcils, comme deux brindilles toutes courtes. Sa belle robe rouge à pois neige avait prit un de ses coups de crasse! Je manquais de la vexer, on avait pas ressorti l'habit de scène depuis des semaines. Elle avait la mine des grands jours, Sleepie-doo. Ca sonne un peu comme Scoubidoo, c'est pour ça que j'aime bien l'appeler comme ça. Et puis, elle prononça les premiers mots dans cette pièce m'étant destinés depuis des qu'elle y soit entrée. Car je doutais que la chanson, la notre, -si brillament nomée Hypo! par mes soins-, celle qu'elle chantonnait en entrant dans ma piaule, oui je doutais qu'elle me soit réellement destinée. Elle murmura faiblement :
- T'es prête ?
- Here comesss deliveryyyyyyy! Hurlais-je soudain en riant, me rappelant Pete, le gentil Doherty, pour lequel on avait fait une première partie, un jour lointain. Avant le succès.
Je rabatis les couvertures et tanguais un peu en sortant du lit. Sleepie accourut pour saisir ma taille entre ses doigts tout longs.
- Tu fais peur à voir, murmura-t-elle encore, comme si ces mots faisaient moins mal prononcés bas.
J'eus peur qu'elle me demande encore ce qui n'allait pas chez moi, mais elle connaissait la réponse, c'était purement rhétorique.
Je partis d'un grand rire fou. Fou, fou, fou!
- Tu as mangé ? M'appostropha-t-elle inutilement en retirant les paumes de ses mains de mon corps, comme si ce contact aurait pu la bruler.
De mon corps jaillissait un torrent de flammes, qui ruisselaient et telles des liannes, saisissaient à la gorge mes pauvres spectateurs. J'essayais même plus de les contrôler, mes plantes incandescentes. Parfois, on appelait ça du désespoir. Mais rassurez-vous, chez moi, il est de quantité limité. Je suis la personne la plus vierge d'ondes négatives que vous pourriez croiser.
Mais vous ne me croiserez jamais. Je n'existe qu'en pensée. Je suis une âme! Une de ses âmes! Une dead soul de Nine Inch Nails qui vagabonde parfois jusqu'à la scène, et parfois même, je pousse la chansonnette !
Mais ne vous méprenez pas. Je n'existe pas. Ou plus.
Je m'éfface, peu à peu, sans doute, un déclin fatidique.
Il arrive que, même quand un corps est habité par la plus grande joie de vivre, ou par la générosité la plus poignante, si prenante qu'elle en devient parfois ridicule, oui il arrive que le caractère s'alterne. Je ne dis pas que c'est ce qui m'est arrivé, non monsieur!
Mesdemoiselles, touchez ce corps qui suinte, cernez mes cernes, éffleurez mes lambeaux! J'ai cessé d'exister à la seconde ou elle est entrée dans ma vie. C'est une confidence, prenez donc cet aquis comme une révélation!
Soit. Sleepie Walk-the-line attrapa une paire de bas en boule avec laquelle j'avais du faire les poussières, un jour, et l'enfila. Des résilles noires pleines de trous. Même ça, ça l'habillait comme si Vivienne Westwood avait posé ses yeux sur sa silhouette. Elle ressemblait pas à Nancy hein! Non non.
Elle balaya d'un revers de main trois cents mégots, la table en bois était tellement brulée par mes traces incandescentes qu'elle était irrisée d'une jolie couleur noire.
- C'est joli tout ce noir, acquiesçais-je.
J'appréciais son besoin, comme le mien, de vouloir faire ressortir l'esthétique même dans des moments aussi critiques. Après tout, j'allais remonter sur scène! L'adrénaline! J'en gerbais des flammes de bonheur.
Sleepie s'affola. Elle releva mes cheveux, qui avaient doucereusement poussé comme des tiges étranges le long de ma nuque, tandis que je vomissais tripes et boyaux dans la cuvette immonde des jolies toilettes. Des flammes, que je dis!
Elle essuya ma bouche dans un moment de solidarité, puis tira un rideau d'eau brunâtre et m'assit sur le bord de la baignoire. J'avais froid.
Elle me giffla, puis me contempla de ses grands yeux bleux.
- Callie, appela-t-elle en fixant le carrelage comme si elle cherchait un soutien moral. Callie (oui, c'est mon nom, pour ceux qui se demandent... Enfin je crois...), Callie tu m'entends ?
Ah, non, elle fixait pas le carrelage, mais mois si. Tiens, une tâche rose là. C'est ma teinture qui a fait ça ? Tiens donc! Curieuse couleur! Pourquoi donc ais-je les cheveux comme ça ? Ma foi, c'est pas moche.
- Callie, aujourd'hui, ce soir, tu vas remonter sur scène? Je sais. T'es pas en état. Mais faut leur dire. Faut que tu sortes ce flot de trucs de ton coeur! Callie tu m'écoutes ?
- Ouais bien sûr, acquiesçais-je en ronronnant de plaisir.
- Tu vas tenir ? Dis, ma belle, tu vas tenir ? Réponds-moi! Aligne moi une phrase, récite des paroles, tiens moi cette voix, sors là de ton petit corps!
" A la lumière de nos secondes journées qui s'entrecoupent de la douleur acide de mes côtes brisées, écrabouillées. Comme on entend la pluie battre sur mes volets..." murmurais-je, totalement folle.
- C'est la douleur, acquièsça-t-elle en passant une main douce sur ma joue, comme si c'était la chose la plus normale du monde.
Oui, la douleur. La douleur, encore la douleur. Même les anthalgiques n'y pouvaient plus rien, dans ce torrent pluvieux de rien me dégouilnant dessus.
Elle ouvrit le robinet. L'eau était si belle! Limpide, claire, elle s'écoulait si vite que j'en eu le tournis. Inconscienmment, sciemment fascinée, je me glissais sous le jet, et Sleepie, non plus gênée que si elle eût été ma mère, m'observait du coin de son oeil. Elle prit la minuscule bouteille de shampoing, qui gisait dans un coin, et savonna ces quelques mèches bubblegum. Je m'assis dans la baignoire, et fascinée, observais le goutte à goutte merveilleux vers les égouts.
- Ca suffit, souffla Sleepie en me relevant comme on ordonne à un gosse de s'endormir.
J'aurais voulu m'endormir. Pour longtemps. L'eau m'avait toujours dégrisée. Et quand j'en sortais, mes pupilles se rétractaient, mon souffle se sacadait, des battements désordonnés prenaient place dans mon coeur en extase, c'était le mot! Oui, ce mot!
L'extaseee! La scène! L'adrénaline!
à suivre.